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Carnet de Voyage

      Ce nouveau volet va vous transporter en Inde du nord, découvrir des personnes hors du commun, des ascètes hindous qui ont renoncés à toute attache de leur vie matérielle pour se consacrer uniquement à leur quête spirituelle, on les appelle des Sâdhus…

       Pour aller à leur rencontre, je décide de partir en voiture de l’aéroport de Delhi en direction de Haridwar, c'est l'une des sept villes les plus sacrées de l'hindouisme.

     Posée au pied de l’himalaya,  c'est la première ville importante sur le Gange et le point de départ de pèlerinage vers les sources du fleuve, le saint des saints des hindous, les fidèles y affluent par millier chaque année afin de rendre un dernier hommage à leurs ancêtres ou pour venir faire un vœu aux trois Déesses Mères trônant sur leurs pitons rocheux.

       Haridwar est aussi célèbre pour être l’une des quatre villes indiennes qui accueillent l’incroyable « Kumbh Mela », le plus grand rassemblement spirituel au monde.

      Le fidèle qui se baigne dans le Gange à Haridwar verrait son karma détruit…En accomplissant des ablutions dans ces hauts lieux de l’Hindouisme, il pourra mettre fin au cycle des naissances et des morts (réincarnation) pour atteindre Moksha (la libération spirituelle).

        En arrivant dans la ville, je n’ai pas de mal à trouver ces hommes, qui se concentrent essentiellement aux abords du Gange, facilement reconnaissables, ils s'habillent d'un longhi, d'une tunique, de couleur safran pour les shivaïtes, disciples de Shiva et jaune ou blanche pour les vishnouites, disciples de Vishnu,  symbolisant la sainteté.

      Ils n'ont pas de toit et passent leur vie à se déplacer sur les routes de l'Inde et du Népal, se nourrissant des dons des dévots.

En tant que renonçants, ils coupent tout lien avec leur famille, ne possèdent rien ou peu de choses.

       Les sâdhus shivaïtes se recouvrent le corps tous les matins de cendre et ont de longs cheveux de type dreadlocks noués au dessus de leur tête tellle la chevelure du Dieu Shiva et ont le front peint de trois bandes (qui représentent le trident de Shiva).

       Les sâdhus vishnouïtes portent une tunique jaune ou blanche et le front est orné d’un U blanc et du tilak rouge de Sita. Ils sont barbus ils portent les cheveux longs et ont des colliers. Ils récitent les mantras, pratiquent le yoga, les exercices de méditation et de respiration et consomment du cannabis.

      A l’heure du crépuscule du soir, on peut assister à Hari-ki-Pauri Ghat (Ghat = marches menant aux rives du Gange) a un puissant rituel, spirituel et exaltant, le Ganga Aarti, cérémonie qui a lieu face au fleuve. Les prêtres hindous, en psalmodiant les louanges et autres incantations à la gloire de Mère Ganga, font les offrandes des lumières, la présentation des lampes dans des traditionnelles gestuelles solennelles de circonvolution magistrale dans le sens d’aiguilles horaires.

      Impossible de demeurer insensible à tant de voix qui crient leur dévotion à l’unisson, impensable de ne pas être envoûté par la puissance de ce rituel ancestral tout simplement poignant. Et il en va ainsi tous les soirs, lors de la cérémonie du Ganga Aarti  l’adoration du fleuve  sur le ghat de Har-ki-Pairi, à Haridvar.

     

Après une heure de voiture, mon périple à la recherche de Sâdhu s’arrête à Rishikesh, c’est une ville de l'État de l'Uttarakhand, dans le nord de l'Inde. Située aux pieds de l'Himalaya, la ville est connue comme cité de pèlerinage, elle attire de nombreux hindous et également des occidentaux pour ses ashrams où le yoga est enseigné. Les Beatles ont rendu ce lieu célèbre en 1968, en venant y étudier la méditation transcendantale enseignée par le Maharishi Mahesh Yogi dans son Ashram.

   Capitale mondiale du yoga autoproclamée, Rishikesh m’est apparu resplendissante à la traversée de Jahma Jhula, pont suspendu piéton, emprunté par autant de motos et de scooters agités que de paisibles vaches… Cet havre de spiritualité semble monté de toutes pièces pour accueillir des centaines de « yogistes » du monde entier, il inspire malgré tout une douceur de vivre, et invite à la flânerie en compagnie des sâdhus qui peuplent les artères principales.

    Les quartiers piétons de Swargashram et de Lakshman Jhula sont propices au repos de l’âme. Outre les dizaines de rencontres de Sadhus que j’ai pu faire en foulant ces lieux saints, je n’ai qu’une envie, c’est d’assister au Ganga Aarti de renommée mondiale au coucher du soleil au sein du plus grand ashram de Rishikesh, "Parmarth Niketan"qui offre une atmosphère propre, pure et sacrée à des milliers de pèlerins du monde entier. Avec plus de 1000 chambres, les installations allient des équipements modernes et une simplicité spirituelle traditionnelle. Les activités quotidiennes comprennent les prières universelles du matin, le yoga et la méditation.

Les fans reviennent dans l'ashram des Beatles

      C'est un lieu mythique dans l'histoire de la musique. Dans l'ashram Indien de Rishikesh, les Beatles connurent, il y a plus de 50 ans, une de leurs périodes les plus fécondes, ils étaient venus pour apprendre la méditation transcendantale, ce fut le moment le plus créatif de leur histoire, avec la composition de 48 titres et c’est dans ces lieux qu’ils ont composé une grande partie du « génialissime » double album blanc paru en 1968.

       Le site, longtemps laissé à l'abandon, est colonisé par la jungle. Mais depuis sa réhabilitation partielle, à partir de 2016, et la construction d'une clôture pour éloigner les animaux, le site renaît grâce au tourisme.

        « Let it be. » Prophétiques, les mots de Paul McCartney sont peints sur le mur d'une salle de méditation envahie par la végétation et les rayons du soleil. Avec le temps, les vitres des fenêtres ont volé en éclats, le toit a disparu et les peintures se sont écaillées. La nature a repris ses droits et des artistes graffeurs ont orné les crépis écaillés de graffitis et de peintures murales en hommage aux Beatles.

       Une beauté paisible et poétique enveloppe cet ermitage abandonné, qui s'étend sur 7,5 hectares et surplombe le Gange et la ville sainte de Rishikesh.

     De retour à Haridwar, je décide de poursuivre ma progression dans la descente du Gange en empruntant un train de nuit à destination de Allâhâbâd, qui est située au confluent des fleuves sacrés : Gange et Yamuna, sur lesquels se greffe une rivière mythique, la Saraswati, aux vertus purificatrices. Les hindous croient que se baigner au confluent de ces fleuves permet d'effacer tous les péchés.

      Cet emplacement lui confère de grands pouvoirs purificateurs et elle voit à ce titre se dérouler tous les 12 ans, au lieu-dit « Sangam » un Kumbh Mela qui rassemble des millions de pèlerins du monde entier pour un bain sacré. Le pèlerinage n'a lieu que tous les douze ans car selon la religion hindoue, une journée de vie d'un dieu équivaut à douze années terrestres.

Allahabad est une ville universitaire très réputée, mais peu fréquentée par les touristes en dehors des pèlerinages.

     J’y rencontre néanmoins des sâdhus, sans trop m’y attarder, car je ne veux pas être en retard pour assister à la cérémonie de l’Aarti à Chittrakoot et plus précisément au  Ram Ghat, l'un des ghats les plus animés de Chitrakoot, il se trouve sur la rive de la rivière Mandakini et de nombreux fidèles le fréquentent. Au matin, les fidèles viennent effectuer le surya namaskar (prière au dieu du soleil) et se baignent dans la rivière. Cependant, l'attraction principale est l'Aarti qui a lieu chaque soir : des prêtres vêtus en tenue traditionnelle couleur safran prient le seigneur et chantent des shlokas.

     Le lendemain, je repars en direction de la ville sainte de Varanasi (Bénarès) destination tant attendue depuis le début de mon voyage, ma première rencontre a déjà eu lieu quelques années auparavant, Varanasi est un véritable choc de culture dont il faut se préparer. La découverte de cette cité si singulière ne vous laisse pas indifférent et vous marque à jamais, Varanasi figure parmi les plus anciennes cités du monde.

         Haut lieu de pèlerinage pour les adeptes de la religion hindoue, la ville est traversée par le Gange qui symbolise les cheveux de la déesse Shiva. Sur les rives du fleuve, la série de ghats continue de recevoir les rituels. Au lever du jour, vous y verrez les fidèles se baigner le long des ghats afin d’expier leurs péchés, une scène à la fois mystique et envoûtante.

Les Crémations Sur Les Ghats

 

     Dans l’hindouisme, une incinération à Varanasi permet de stopper le cycle des réincarnations et permet donc d’atteindre le Moksha, équivalent du Nirvana chez les bouddhistes. Les hindous croient en la réincarnation, leur rapport à la mort est donc inversé, et cela donne à leur vie un sens très différent. Cette différence qu’on ressent dans chaque parcelle de Bénarès et dans chaque scène de vie que l'on croise... Les porteurs de défunts défilent sur les Ghâts sans que cela ne choque car ce n'est qu'un passage pour une autre vie, pas un départ.

 

       Le principal ghat de crémation à Varanasi est le Manikarnika Ghat. Il y aurait environ 200 crémations par jour à Varanasi.

En toute logique, par respect pour le défunt et sa famille, les photos/vidéos sont interdites. Respecter cela est primordial.

    La crémation suit un certain rituel qui peut clairement choquer le voyageur occidental. Renseignez-vous bien avant d’assister à une crémation.

 

Les rites de la crémation consiste à envelopper le corps du défunt dans des tissus et décoré de fleurs, puis baigné dans le Gange pour une dernière purification. Ensuite, il est amené au bucher. Le bois est un bois spécial, apparemment très huileux et qui permet de masquer à peu près l’odeur du corps qui brûle.

      Le fils aîné du défunt, rasé et habillé de blanc, met alors le feu tout en accomplissant certains rites. L’atmosphère est impressionnante : cela grouille de monde, et les corps s’enchaînent…

      Les crémations ont lieu 24h sur 24h, tous les jours sans exception. Quant aux cendres et restes humains, elles finissent bercées par les flôts du Gange, où se baignent chaque jour des centaines de croyants. Environ 200 kg de bois sont nécessaires pour brûler entièrement le corps. Certaines familles pauvres ne peuvent pas acheter ces 200 kg de bois. Le corps n’est alors pas entièrement brûlé et certaines parties du corps sont jetées dans le Gange et peuvent donc être visibles …

 

      Le fil conducteur de mon périple était le Gange, je suis resté prés d’une semaine à Varanasi pour assister tous les soirs à la cérémonie de l’Aarti. Il s'agit d'un rite religieux de la plus haute importance pour les hindous. Ce rituel a lieu en fin de journée au coucher du soleil. Il rassemble de nombreux fidèles qui viennent à pied ou en bateau.

      La nuit commence à tomber doucement sur le ghât de Dasaswamedh, les fidèles affluent en masse pour avoir la meilleure place. Dans quelques minutes sept prêtres vont officier, chacun sur un plot en béton disposé  au bord du Gange, à une cérémonie d'offrandes à la déesse Ganga, la déesse du Gange. 

       Les lumières s’allument, les prêtres arrivent, se mettent devant leur petit autel respectif recouvert d'un tissu de couleur orangée où sont disposés les divers objets qui vont servir au rituel. La cérémonie débute par un dépôt de couronnes de fleurs fraîches sur les tableaux représentant la déesse Ganga. Suivent des prières adressées à la déesse. Vont se succéder ensuite des gestes ancestraux empreints d'une grande solennité. Les sept prêtres parfaitement coordonnés refont les mêmes gestes aux quatre points cardinaux avec les bâtons d'encens, le gros diffuseur d'encens, le feu sous deux formes différentes, l'eau, l'éventail en plumes de paon et le plumet. Tout en secouant de la main gauche une cloche pour attirer l'attention de la déesse. Le feu purificateur est présenté avec deux objets différents : un grand bougeoir qui comporte de nombreuses bougies puis une coupe à tête de cobra.

    Une fois le feu éteint par des gouttes d'eau du Gange, les prêtres continuent leurs gestes symboliques avec l'éventail en plumes de paon puis avec un énorme plumet. Chaque objet, chaque geste ont bien évidemment une signification que je suis incapable de vous expliquer.

       La nuit est totalement tombée depuis longtemps. L'encens, le feu, le son des cloches, le recueillement de la foule, c ‘est une atmosphère indescriptible, ça a quelque chose de  surréaliste…

Au bout d'une heure, la cérémonie s'achève par des chants repris en cœur par la foule. Puis chaque officiant lance quelques gouttes d'eau sur les pèlerins et une pluie de pétales de fleurs sur le fleuve.

    Pendant une heure on est complètement transporté dans un autre monde, cette cérémonie fait partie de mes moments inoubliables.

A travers ce carnet de voyage, j’ai voulu vous faire partager trois lieux saints, trois lieux qui auront marqué ma mémoire à jamais, certaines villes que j’avais découvert quelques années auparavant et dont je m’étais juré d’y revenir.

       

 

 

       L’Inde est le second pays où j’ai effectué le plus de voyage, du Gujarat au Rajasthan, à la rencontre de communautés en passant par l’Inde Himalayenne afin d’y découvrir le Bouddhisme dans des monastères et trek au Ladhak ,  jusqu’au Bengale Occidental (Calcutta, Darjeeling…) pour accéder à l’état du Sikkim où j’ai eu la chance de marcher dans les pas, foulés par Alexandra David Néel dans son aventure jusqu’au Tibet interdit en 1924. (Autobiographie : Journal d’une parisienne à Lhassa).

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